Histoire des Idées politiques et religieuses
L'histoire des idées est un
domaine de recherche en histoire qui s'intéresse à l'expression et l'évolution
des idées humaines. L'humanisme, considéré comme mouvement de pensée
caractéristique de la Renaissance, a définit une nouvelle image de l'homme où sont
affirmées sa puissance créatrice, sa liberté de penser et d'agir. L'humanisme a
fait, par le fait même, une nouvelle vision du monde en redécouvrant les
sources gréco-latines de notre civilisation, en critiquant les institutions et les traditions du Moyen Àge, en
renouvelant nos modes de connaissances et nos savoirs. Comment s'est élaborée
une révolution mentale qui a fait de l'homme le centre des réflexions en 1400
et 1600? Comment s'est-elle aussi diffusée?
I-Élaboration d'une révolution
mentale
La renaissance renoue avec
l'histoire. Elle définit et sonde le Moyen Âge et redécouvre l'Antiquité. Elle
s'est rendue compte de l'usage que le Moyen Âge avait fait de l'Antiquité.
Donc, elle se lance dans une recherche de manuscrits, des monuments,
inscriptions, souvenirs, une étude de langues latines, grecques et hébraïques
pour établir des liens avec le patrimoine. En outre, au lendemain de
l'installation des royaumes barbares, l'éducation classique s'effond. L'école
antique aussi disparaît entre 480 et 540 en Gaule du Nord, en Gaule du Sud et
plus tard en Italie. De ce fait, les Barbares adoptent le latin comme langue
administrative. Aussi, la fermeture des écoles publiques interdit l'accès à
l'éducation de la majeure partie de la population. La société du Haut Moyen Âge
est devenue une société d'analphabètes. Seules les familles aristocratiques
assurent à partir du VIè siècle une éducation traditionnelle à leurs enfants en
faisant appel à des précepteurs privès ou en assurant une formation au sein de
la famille. Malgré tout, celle-ci est incomplète, parce qu'elle répond peu aux
problèmes de la Christianisation. Donc, toutes ces situations prévalaient en
Europe au Moyen Âge.
Face à cette situation,
l'Église décide prendre en main la formation des fidèles et mettre sur pied un
système éducatif. Les évêques décident de créer des écoles au niveau du Diocèse
et celui de la paroisse. Leur programme portait sur l'écriture sainte et
l'enseignement de la foi, la formation du clergé et des fidèles. C'est en ce
moment que naît l'école chrétienne. Mais les clercs étaient incapables
d'enseigner les bases même de la foi parce que le royaume Franc se trouvait
alors <<Dans un état d'inculture frisant la barbarie.>> Donc,
l'église est en crise, elle est appauvrie et désorganisée. C'est alors que les
premiers Carolingiens et surtout de Charlemagne se sont rendus compte qu'un
redressement s'imposait, tel est leur mérite.
Pour cette raison, au milieu du
VIIIè siècle, une Réforme de l'église a été accomplie par Charlemagne et Pépin
le Brèf et avait pour objectifs un meilleur encadrement des fidèles, une
meilleure diffusion de la parole divine, un relèvement de la formation des
clercs parce que Charlemagne déplore que les écrits qui lui sont adressés par
ses correspondands sont rédigès dans un langage inculte à cause de la
<<nègligence à s'instruire>>. Il conclut vers 794 que: <<
Cela nous a fait craindre que en même temps que décroissait l'aptitude à
écrire, l'interprétation des Écritures redevint aussi bien moindre qu'elle
n'aurait dû être... Nous savons parfaitement que les erreurs de la langue
quoique dangereuses le sont bien moins que les erreurs de
compréhension.>> Alors, cet intérêt pour l'éducation s'explique également
par la volonté de centralisation et de contrôle qui marque son gouvernement.
Au XIVè siècle, l'Europe est frappée par une crise (les
guerres, la famine, la peste) et les intellectuels se détournent de la vision
traditionnelle que propose l'église. Cette vision stipulait que l'homme est
coupable du péché originel, donc, il doit accepter ce malheur pour accéder à la
vie éternelle. Pourtant, les humanistes ont une autre conception du monde.
Selon eux, l'homme peut maîtriser son destin sur la terre, rèfuser la fatalité
et transformer le monde parce qu'il est une créature de Dieu se trouvant au
centre de l'univers. Cette thèse a été accueillie en Europe et entraine des
ruptures dans tous les domaines. Ces humanistes sont souvent des personnes ne
faisant pas partie d'une institution religieuse et non des clercs. Ils
s'appuient ainsi sur les sources gréco-latines dont la connaissance s'enrichit
par la redécouverte de plusieurs textes tels que La Poésie de Virgile,
Rhétorique de Ciceron, notamment grâce aux poètes et érudits Toscan François Pétrarque (1304-1374), nombreux
manuscrits grecs rapportés de Constantinople en Italie à l'approche de la chute
de la ville par savants et clercs (Cardinal Bessarion vers 1395-1472), remise à
l'honneur de Platon, etc.
L'humanisme propose une
nouvelle vision de l'homme et du monde. L'un des thèmes majeurs de l'humanisme
est " l'affirmation de la dignité de l'homme", qui a été créé libre
par Dieu. L'homme, placé au centre de l'univers, est apte à comprendre et à
transformer le monde grâce à la connaissance. L'humanisme crée un contexte de
réflexion et de renouvellement de la pensée religieuse. Esprits profondément
religieux, les humanistes souhaitent une
autre relation de l'homme à Dieu, fondée sur la parole de Dieu.
Nous notons aussi la naissance
de l'esprit scientifique fondée sur l'observation et l'expérimentation, de
nouvelles méthodes d'observation, de calcul, de classification qui permettront
le développement de la science moderne au XVIIè siècle. Il y a aussi un
dépassement des savoirs de l'Antiquité et les progrès scientifiques. C'est, en
effet, l'élargissement de la connaissance (la médecine, l'anatomie, la
cartographie et géographie, l'astronomie, botanique grâce aux grandes
découvertes) pour une meilleure connaissance de l'homme et du monde.
II- Les moyens de diffusion
1- La redécouverte de l'Antiquité
En 1453, les lettrés byzantins
étaient obligés à fuir vers l'Occident avec des manuscrits anciens lors de la
chute de Constantinople. Ils dénoncent l'enseignement traditionnel et proposent
une nouvelle éducation fondée sur l'étude des langues anciennes, l'esprit
critique et l'expérience. Comme Érasme qui affirmait que: <<L'homme ne
naît pas homme, mais le devient>>, ils appellent l'homme à développer
toutes ses facultés et affirment sa place exceptionnelle dans l'univers.
L'homme n'est plus pensé uniquement dans ses rapports avec Dieu.
2- Le livre et la révolution de l'imprimerie
Le livre était encore au XVè
siècle rare et coûteux qui nécessite de nombreuses heures de travail pour le
copiste et l'enlumineur. C'est en 1438, à Mayence que Gutemberg a eu l'idée
d'innover l'imprimerie. L'imprimerie a été un agent de changement radical aux
conséquences inestimables: un savoir rendu massivement disponible. L'imprimerie
fut un accélérateur formidable de la circulation des idées nouvelles. Elle a
permis aux côtés d'autres vecteurs (voyages, mécénat, république des lettres)
de diffuser les idées humanistes en Europe.
Au XVè siècle, sur trente mille
à trente-cinq mille publications; 77% en latin et le reste en italien, en
allemand et en français ; 45% sont des livres religieux. Au XVIè siècle, les
œuvres littéraires, les traductions des ouvrages anciens et modernes et les
écrits des humanistes se multiplient.
3- La république des lettres
À travers les voyages, des
grands écrivains furent connus dans toute l'Europe. C'est le cas de Aristote,
auteur du <<Roland Furieux>>, de Tasse qui écrivit La Jérusalem délivrée. Ils écrivaient
leurs vers en italien littéraire. Érasme est le plus prestigieux de ces
intellectuels. Son ami Thomas More à son tour publie Utopia en Angleterre et devient chancelier du roi Henri VIII.
Nicolas Machiavel (1469-1527) publie un ouvrage intitulé Le Prince où il enseignait l'art de gouverner les hommes. En
France, François Rabelais (1494-1553) proclame dans ses livres Pantagruel et Gargantua
son idéal humanisme et sa foi en l'homme. Quant à Michel de Montaigne
(1533-1592) il fait confiance comme les philosophes de l'Antiquité à la raison
pour construire une sagesse fondée sur la tolérance et le respect d'autrui.
Cependant, notons que la
timidité des humanistes qui n'ont pas toujours osé contredire les Anciens n'a
connu qu'une faible diffusion. Exemple : La <<Révolution
copernicienne>>. Il n'y a donc pas eu à proprement parler de révolution
scientifique à la Renaissance.
4- Les voyages
En de christianiser les
populations des pays d'Afrique et d'Asie, et de trouver des alliés qui les
aideront à combattre les musulmans, les Espagnoles et les Portugais voyagent.
Ils partent aussi pour des raisons économiques. Ils veulent se procurer les
épices et la soie d'Orient que les Européens ont l'habitude d'obtenir par
l'intermédiaire des marchands musulmans et italiens. Ils espèrent aussi trouver
de l'or dans les régions qu'ils atteindront. Tous ces voyages ont connu la
réussite grâce aux progrès nautiques.
5- L'élargissement du monde connu
Après la prise de
Constantinople par les Turcs en 1453, les Européens cherchent de nouvelles
routes vers l'Asie du sud-est, d'où viennent les épices et la soie. En 1492, le
Génois Christophe Colomb au service des rois d'Espagne découvre une route vers
l'Ouest. Il aborde l'île d'Hispaniola (Haïti) au large du contient américain.
Dans les années suivantes, les explorations du navigateur florentin Amérigo
Vespucci conduisent à la certitude que ces <<Indes occidentales>>
sont en réalité un nouveau monde. En 1507, on lui donne le nom d'Amérique.
Partis à la recherche d'un
passage vers l'Est, les Portugais ont progressé le long des côtes d'Afrique. En
1487, Barthélémy Dias double le Cap de Bonne Espérance. En mai 1498, Vasco de
Gama arrive à Calicut en Indes. Pour la première fois l'Afrique a été
contournée par le sud. Enfin, en 1520-1521, l'expédition de Magellan au service
du roi d'Espagne contourne le Sud de l'Amérique et réalise le premier tour du
monde.
6- La nouvelle vision du monde
Ces voyages provoquent un
formidable choc culturel. La tradition qui voyait la terre comme un disque plat
et immobilie au centre de l'univers est concrètement contredite. Dans le même
temps, une autre vision de l'humanité s'impose, celle de la diversité des
civilisations. La découverte des peuples d'Amérique, ouvre le débat sur
l'origine de l'homme : d'où viennent ces <<Indiens>> dont ne parle
pas la Bible?
La première réaction des colons
est de s'approprier leurs terres et de détruire les civilisations aztèques et
inca. Mais sous l'influence de quelques hommes, comme le Dominicain Bartolomé
de Las casas, le Pape Paul II affirme en 1537, la dignité humaine des Indiens.
Cependant, la mise en valeur du Nouveau monde se fait au prix du développement
de la traite des Noirs amenés d'Afrique.
7- Les mathématiques et l'astronomie
Le développement des
mathématiques connaît un renouveau avec la diffusion de l'œuvre du
mathématicien grec Euclide dont la première édition complète est imprimée en
Italie en 1482. Plus rapide et plus précis, le calcul par écrit avec les
chiffres arabes remplace progressivement le calcul avec un boulier. Le calcul
algébrique connu depuis longtemps en Inde et dans les pays arabes est perfectionné
par l'Italien Jérôme Cardan (1501-1586) qui résout des équations au 3è degré et
par le Français Viète (1540-1603) qui systématise l'usage des lettres pour
designer les quantités connues et inconnues, consonne pour les grandeurs
connues, voyelles pour les inconnues. En astronomie, le Polonais Copernic
(1473-1543), adoptant une démarche que l'on peut qualifier de scientifique,
démontre que la terre n'est pas le centre de l'univers et qu'elle tourne autour
du soleil(l'héliocentrisme).
L'humanisme et la Renaissance
ont induit de profonds changements de la pensée et des savoirs, et furent
résolument porteurs de nouveautés. Les idées humanistes ont profondément
influencé les artistes de la Renaissance. L'humanisme a également ouvert la
voie de la Réforme. Mais partagé entre un désir de retour aux sources et une
soif de nouveauté, entre une timidité restauratrice et une audace novatrice,
l'humanisme ne fût pas une rupture radicale, mais plutôt une dynamique
particulièrement marqué dans la pensée (et les arts) qui a affecté l'Europe aux
XV et XVIè siècles, et qui marquera durablement la pensée occidentale.
Bibliographies
* Olivier Nay, Histoire
des idées politiques, Paris, Armand Colin, 2007, 597p
* Jean C. Baudet, Les
agitateurs d'idées en France, Paris, Boite à Pandore, 2014, 343p
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